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La semaine du droit immobilier

Civil - Immobilier
01/02/2021
Présentation des dispositifs des arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation, en droit immobilier, la semaine du 25 janvier 2021.
Parcelle – expropriation partielle 
« Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 30 avril 2019), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 28 janvier 2015, pourvoi n° 13-11.884), le 27 décembre 1977, la société civile immobilière (SCI) de la Perrière neuve a conclu un bail emphytéotique sur une parcelle cadastrée 205, appartenant aux consorts Didier.
Après expropriation partielle au profit de la commune de Chambéry, cette parcelle a été divisée en deux parcelles cadastrées, l'une 234, correspondant à la partie expropriée, sur laquelle la commune a construit un parc de stationnement public, et l'autre 235, demeurée hors emprise.
Le 14 novembre 1991, la SCI de la Perrière neuve a conclu avec la SCI du Traîneau d'or un sous-bail emphytéotique portant sur la parcelle 235.
Après déclaration d'utilité publique, les consorts Didier ont consenti à la commune de Chambéry la cession amiable d'une partie de la parcelle 235, laquelle a été divisée en deux parcelles cadastrées, l'une 256, cédée à la commune, et l'autre 257, conservée par les consorts Didier.
Les SCI de la Perrière neuve et du Traîneau d'or ont assigné la commune aux fins, notamment, d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices résultant de leur expropriation sans indemnité et de faire constater l'état d'enclave de la parcelle 257.
L'article 684 du Code civil, qui prévoit que, si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes, ne s'applique pas en cas d'enclave résultant de la division d'un fonds par suite d'une expropriation pour cause d'utilité publique.
La cour d’appel a constaté que la parcelle 235 était issue de la division d’un fonds par suite d'une expropriation pour cause d'utilité publique.
Il en résulte que la demande, dont la cour d’appel était exclusivement saisie et qui tendait à la fixation de l'accès à la voie publique sur la parcelle 234 et à la condamnation de la commune de Chambéry à payer le coût des travaux de création d'un accès, par cette parcelle, jusqu'à la voie publique, devait être rejetée.
Par ce motif de pur droit, suggéré par la défense et substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par l’article 620, alinéa 1er, du Code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée.

Vu l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 545 du Code civil et l'article L. 13-2, alinéa 2, devenu L. 311-2, du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique :
Aux termes du premier texte, la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.
Aux termes du deuxième, nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.
Aux termes du troisième, le propriétaire et l'usufruitier sont tenus d'appeler et de faire connaître à l'expropriant les fermiers, locataires, ceux qui ont des droits d'emphytéose, d'habitation ou d'usage et ceux qui peuvent réclamer des servitudes.
Il résulte de ces dispositions que la prise de possession intervenue sans fixation ni paiement préalable de l'indemnité d'expropriation constitue une emprise irrégulière qui ouvre droit à indemnisation au profit des titulaires de droits réels immobiliers sur le bien exproprié dont l'expropriant connaissait l'existence.
Pour rejeter les demandes des SCI, l'arrêt relève qu'elles fondent leur demande d'indemnisation sur l'existence d'une voie de fait commise et retient que, en l'espèce, pour la prise de possession des parcelles expropriées, la commune n'a procédé à aucune exécution forcée et n'a pas procédé de manière irrégulière, l'ordonnance d'expropriation ayant éteint, par elle-même et à sa date, tout droit réel ou personnel existant sur les parties de parcelles expropriées, que, de plus, l'atteinte à un droit réel immobilier ne saurait être assimilée à une atteinte au droit de propriété lui-même, de sorte que les emphytéotes, qui ne peuvent se prévaloir d'un droit de propriété, ne peuvent invoquer une voie de fait, et que, enfin, la commune de Chambéry n'a pris de décisions que dans le cadre de ses pouvoirs en sa qualité d'autorité expropriante.
En statuant ainsi, alors que, même en l'absence de voie de fait, les emphytéotes, dont le droit était éteint par l'ordonnance d'expropriation, avaient droit à indemnisation, la cour d'appel a violé les textes susvisés
 ».
Cass. 3ème civ., 28 janv. 2021, n° 19-21.089, P *
 
 
*Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 1er mars 2021
 
Source : Actualités du droit